DMLA

La dégénérescence maculaire liée à l’âge (DMLA) est la troisième maladie oculaire la plus fréquente après la cataracte et le glaucome, représentant près de 10 % de toutes les maladies oculaires. Cette maladie du centre de la rétine affecte les cellules sensorielles de la rétine (photorécepteurs), l’épithélium pigmentaire, la membrane de Bruch et la choroïde sous-jacente.

  • GÉNÉRAL, EXPLICATION DES TERMES
    Dégénérescence maculaire sèche avec de gros drusens confluents et une irrégularité pigmentaire.
    Dégénérescence maculaire humide liée à l'âge avec des exsudats durs et des saignements.
    Passage d'une dégénérescence maculaire sèche à une dégénérescence maculaire humide.

    Macula signifie « tache ». Mais la macula désigne aussi la « tache jaune » ou point de vision le plus net. Il s’agit du centre de la rétine, sans lequel la fixation et la reconnaissance des objets, c’est-à-dire la lecture, l’écriture, la reconnaissance des visages, le fait de regarder la télévision, etc. sont impossibles. C’est précisément cette région de la rétine qui est touchée par la DMLA. La déficience de la vision nette n’affecte pas le champ de vision latéral. Cela signifie que la vision de loin, les activités telles que le travail à la maison ou au jardin, sont à peine affectés. Le risque de dépendance ou de cécité sont rares, même dans les cas graves. Par contre l’aptitude à la conduite peut être perdue.

    À partir de 60 ans, rarement avant, l’ophtalmologue peut observer des changements bien avant l’apparition des premiers symptômes cliniques. Avec l’âge, le risque de développer une DMLA avec pour conséquence une détérioration de la vision, ne cesse d’augmenter. Des facteurs génétiques influencent le risque individuel tout comme le moment de l’apparition de la DMLA. Il est probable que toute personne âgée, développe une DMLA. Elle est la cause la plus fréquente de déficience visuelle sévère chez les personnes âgées, dont elle touche environ 25 % des plus de 65 ans.

    Il existe deux formes de DMLA : la DMLA sèche – qui représente 85 à 90 % des cas – entraîne une détérioration lente et progressive de la fonction visuelle sur plusieurs années, voire plusieurs décennies. Il n’existe pas de traitement pour cette forme. Chez 10 à 15 % des patients, elle finit par se transformer en DMLA humide. Celle-ci est plus agressive et entraîne une détérioration rapide de la vision. Seuls 10 % des cas de déficience visuelle sévère sont causés par la forme sèche, et 90 % par la DMLA humide, qui, si elle n’est pas traitée, peut entraîner une perte complète de la vision centrale.

    On peut se demander pourquoi cette maladie affecte uniquement le centre et ne touche pas les autres zones de la rétine. La grande fragilité de cette zone provient de l’anatomie même du centre de la rétine, spécialisée dans la vision d’acuité maximale. Les vaisseaux sanguins de la macula, qui pourraient nuire à une vision optimale, ont été omis. Ainsi, la nutrition et l’approvisionnement en oxygène de cette zone ne sont assurés qu’indirectement par l’épithélium pigmentaire (pigment visuel) et la choroïde, qui sont situés derrière la rétine. Cela signifie que toutes les voies d’approvisionnement sont longues et sensibles aux changements liés à l’âge ou à certaines pathologies, en particulier l’apparition de dépôts qui créent des barrières de diffusion.

    La haute performance visuelle s’accompagne d’un grand nombre de processus métaboliques biochimiques. Leurs déchets peuvent être facilement éliminés dans les jeunes années. Mais avec l’âge, la capacité d’élimination diminue, les déchets restent donc sous la rétine, ce qui amène un épaississement de la membrane dite de Bruch, une couche située derrière l’épithélium pigmentaire entre la rétine et la choroïde. Cette barrière réduit l’apport et l’élimination des nutriments et des déchets vers et depuis la macula.

  • CAUSES

    Sur le plan clinique, l’ophtalmologue distingue des taches jaunes à l’arrière de l’œil, appelées drusen. On trouve de petits drusen isolés chez de nombreuses personnes de plus de 50 ans. Plus les drusen sont nombreux et volumineux, plus le risque qu’ils entraînent une perturbation des cellules photoréceptrices au centre de la rétine augmente. Pourtant, à ce stade, les patients ne remarquent encore rien. Associé à d’autres modifications des cellules de l’épithélium pigmentaire, cet état peut évoluer vers la DMLA. Tant que la fonction visuelle n’est pas perturbée, on parle de maculopathie. Les changements ne sont pas perçus par le patient et un traitement n’est pas nécessaire (et impossible). Ce n’est que lorsque les changements provoquent une diminution de l’acuité visuelle, qui mène au début principalement à une mauvaise vision des contrastes et à une vision plus faible dans l’obscurité, suivi par des problèmes de lecture, qu’on parle de DMLA.

    La cause exacte de la DMLA n’est pas connue. Outre l’âge, divers facteurs de risque ont été identifiés. Il s’agit notamment d’une prédisposition génétique (les parents et/ou les frères et sœurs sont également atteints de DMLA), du tabagisme (également chez les anciens fumeurs), des troubles du métabolisme des lipides (hypercholestérolémie), de la malnutrition et de l’obésité, des maladies du système cardiovasculaire, d’une iris légère et d’une exposition importante (non protégée) au soleil au cours de la vie. Les femmes sont plus fréquemment touchées que les hommes. Bien entendu, un œil est également plus vulnérable si l’autre œil est déjà malade.

    Comme nous l’avons déjà évoqué, la distinction entre une forme sèche ou non exsudative et une forme humide ou exsudative, est cruciale pour les options thérapeutiques. La forme sèche, ou non exsudative, est caractérisée par une réduction allant jusqu’à l’atrophie de l’épithélium pigmentaire, des fins vaisseaux choroïdes (choriocapillaris) et des cellules sensorielles de la rétine. Il n’existe pas encore de traitement établi pour cette forme.

    Dans la forme exsudative, ou humide, en plus des changements connus de la forme sèche, on trouve des vaisseaux sanguins nouvellement formés (néovascularisation) en raison de la perturbation nutritionnelle locale et de l’altération de l’approvisionnement en oxygène, et qui se développent le plus souvent à partir de la choroïde sous la rétine. Ces nouveaux vaisseaux sont une tentative de la rétine insuffisamment approvisionnée, de compenser le manque d’oxygène causé par les barrières. Ce problème n’est présent qu’au centre de la rétine et n’a rien à voir avec la nutrition en général. Les nouveaux vaisseaux sont moins denses et moins stables que les vaisseaux naturels de la rétine, ce qui permet aux composants sanguins de s’infiltrer dans la rétine.

  • SYMPTÔMES

    L’accumulation de liquide (œdème) dans la rétine entraîne une vision déformée, floue et nébuleuse. À long terme, la fuite de composants sanguins entraîne une cicatrisation du centre de la rétine, et ces zones de la rétine sont alors aveugles. Les personnes concernées les perçoivent comme des taches sombres sur un fond clair, avec une vision déformée sur les côtés.

  • DIAGNOSTIC
    Le test de la grille d'Amsler fournit des informations quant à la vision déformée du patient.

    On a constaté qu’une libération accrue de facteurs de croissance endothéliale vasculaire (Vascular Endothelial Growth Factor = VEGF) était le déclencheur de la néovascularisation. La neutralisation du VEGF par des inhibiteurs spécifiques dits d’angiogenèse, entraîne l’obturation, voire la régression des vaisseaux nouvellement formés. Entre-temps, plusieurs médicaments sont disponibles (Lucentis®, Eylea® et Beovu®) qui révolutionnent le traitement de la DMLA humide. Ils permettent non seulement d’éviter une perte d’acuité visuelle, mais aussi, dans de nombreux cas, ce qui était auparavant considéré comme impensable, de conserver la capacité de lecture et d’améliorer la vision pendant de longues années, bien que dans la plupart des cas, une normalisation de la vision ne soit pas atteinte. En plus des médicaments susmentionnés, le Bevacizumab, un médicament anticancéreux (Avastin ®), est utilisé un peu partout comme une alternative moins coûteuse. À court terme (plus de 2 ans), cette thérapie donne des résultats presque aussi satisfaisants que les deux médicaments approuvés. Mais dans la plupart des cas, la stabilité et la sécurité à long terme en ce qui concernant les effets secondaires, ne plaident pas en faveur de ce traitement. Beovu® n’est autorisé en Suisse que depuis 2020. Son avantage, par rapport aux autres médicaments déjà disponibles sur le marché, réside dans sa durée d’action prolongée qui permet une réduction de la fréquence des injections. Cependant, il existe également un risque accru d’inflammation oculaire potentiellement grave, raison pour laquelle ce produit n’est actuellement utilisé qu’au cas par cas.

    Un diagnostic le plus tôt possible est la première condition pour la réussite du traitement. Celui-ci peut également être établi par le médecin de famille. En constatant au moyen de l’ophtalmoscope, la présence de taches jaunes (drusen ou dépôts de protéines) ou des saignements, il peut suspecter un diagnostic. S’il y a également une distorsion des lignes de la grille d’Amsler, une dégénérescence maculaire humide peut être soupçonnée. Dans ce cas, l’ophtalmologue doit rapidement (dans les jours ou les semaines) examiner le fond d’œil (ophtalmoscopie). Si un gonflement de la rétine avec des saignements et des dépôts de protéines dans la rétine est constaté, le diagnostic d’une dégénérescence maculaire humide est presque certain. Une angiographie à la fluorescéine (examen au colorant des vaisseaux rétiniens pour détecter les fuites et la formation de nouveaux vaisseaux sanguins) peut alors être effectuée. Ceci pour clarifier le diagnostic et évaluer le succès du traitement dans les cas douteux de dégénérescence maculaire humide et pour évaluer la localisation ainsi que l’extension de la formation de nouveaux vaisseaux sanguins sous la rétine. En alternative ou en complément de l’angiographie par fluorescence, il est possible d’utiliser une angiographie OCT pour visualiser, en trois dimensions, les structures vasculaires de la rétine et de la choroïde sous-jacente. Le grand avantage de cette technique est quelle est non invasive.

  • TRAITEMENT

    Dès que le diagnostic est établi, des médicaments sont injectés mensuellement dans le corps vitré de l’œil affecté. À l’aide de la tomographie à cohérence optique (OCT), on évalue la régression du liquide dans la rétine et, par conséquent, la nécessité de nouvelles injections. En règle générale, un minimum de 6 à 8 injections et un maximum de 10 à 12 injections sont nécessaires au cours de la première année afin d’obtenir une l’acuité visuelle optimale.

    Deux grandes études (étude MARINA et ANCHOR) ont montré que les injections mensuelles dans l’œil n’entrainent pratiquement pas d’effets secondaires et sont bien tolérées lorsqu’elles sont administrées dans des conditions stériles. En moyenne, ce régime de traitement agressif permet d’obtenir un gain d’acuité visuelle de deux lignes, ce qui signifie même, dans de nombreux cas, une fonction visuelle en grande partie illimitée et une conservation de la capacité de conduite et de lire.

    Si, en revanche, au lieu d’effectuer des injections mensuelles – et quel que soit le tableau clinique – on effectue des injections basées sur l’observation d’une récidive de la maladie (cliniquement ou par OCT), ou si les intervalles de traitement sont rigides et trop longs, cela signifie moins d’injections (5 à 6), mais aussi un gain visuel, comme le montrent trois autres études (PIER, SUSTAIN, EXCITE).

    Étant donné que l’injection mensuelle pose d’énormes problèmes logistiques aux patients et à leurs proches, mais aussi aux médecins qui les soignent, la solution de compromis consistant à « récupérer autant que possible et faire le moins d’injections possible », telle qu’elle a été examinée dans ces dernières études, est désormais acceptée dans la pratique clinique quotidienne. Dans le passé, les patients étaient examinés tous les mois afin de limiter le risque de réactivation inaperçue et de détérioration de la vision pour, le cas échéant, pouvoir les traiter rapidement. Néanmoins, cette approche reste un compromis entre des résultats optimaux d’acuité visuelle optimaux et un stress le plus faible possible pour les patients. L’injection mensuelle de médicaments dans l’œil étant à la fois stressante et très coûteuse pour les patients, le traitement préventif est de plus en plus utilisé pour maintenir la maladie inactive et ainsi éviter qu’elle ne s’aggrave. Les intervalles de traitement sont progressivement élargis tant que la dégénérescence maculaire reste sèche (aucun liquide n’est stocké dans la rétine).

  • PROBLÈMES GÉNÉRAUX ET COMPLICATIONS

    En principe, la progression de la DMLA humide et sèche ne peut être ni empêchée ni inversée à long terme (c’est-à-dire sur de nombreuses années). Toutefois, l’élimination des facteurs de risque susceptibles d’avoir une influence (par exemple le tabagisme) et éventuellement un régime alimentaire riche en vitamines, permettent peut-être de retarder la progression. L’association de certains antioxydants (en particulier la lutéine) et de compléments alimentaires (en particulier le zinc) peut, dans certains cas, retarder la transition d’une forme sèche à une forme humide, comme l’a montré l’étude ARED, très citée, bien qu’il y ait encore un doute concernant les effets secondaires d’un traitement à long terme. Différentes préparations sont maintenant disponibles, parmi lesquelles l’Ocuvite ® Lutein et le Vitalux®Plus, qui représentent la plus grande part de marché. Les extraits de ginkgo biloba et de myrtille sont également mentionnés comme traitement de la dégénérescence maculaire, mais n’ont probablement aucun effet scientifiquement prouvé qui justifierait leur utilisation ainsi que leur coût. Ils ne devraient donc pas être recommandés. Une détérioration de l’acuité visuelle dans la DMLA sèche ne peut être évitée à long terme. Dans la DMLA humide, un diagnostic et un traitement précoces sont la clé de la stabilisation de la fonction à long terme.